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MAITRISE ORTHOPEDIQUE

//

23

TECHNIQUE

REPRISES DE PTG POUR ALLERGIE AUX MÉTAUX

P. MERTL, Y. BULAID, M. DEHL

CHU Amiens

Figure 1 : Lésion histologique caractéristique avec infiltrat lym-

phocytaire péri-vasculaire.

Figure 2 : Patch tests cutanés.

1 -

A

llergie aux

métaux

et

PTG

Malgré d’excellents résul-

tats cliniques et une indéniable

amélioration de la qualité de

vie, l’arthroplastie totale de

genou reste grevée d’un certain

nombre d’échecs, et le taux de

reprise chirurgicale atteint près

de 2 % à 5 ans

(1)

. Les causes

d’échec sont en règle multi-

factorielles, même si les prin-

cipales demeurent davantage

mécaniques que biologiques

(2,3)

. Cependant, le relargage

d’ions métalliques, produits

essentiellement par corro-

sion, oxydés et réabsorbés, est

capable d’interagir avec le

système immunitaire et de

déclencher des effets immu-

no-toxiques comprenant des

réactions

d’hypersensibilité

retardée

(4,5)

.

Le nickel , le cobalt et le

chrome

représentent

les

allergènes métalliques prin-

cipaux

(11)

, tandis que le vana-

dium, le titane et le manganèse

sont moins fréquemment en

cause

(6,7)

. Le diagnostic d’une

allergie aux métaux d’une PTG

est difficile. Il faut bien sûr

éliminer les diagnostics prin-

cipaux en particulier une cause

infectieuse ou mécanique. Le

principal obstacle pour étayer

un tel diagnostic est l’absence

de tests reconnus de façon

universelle

(8)

. Plusieurs tests

in vitro basés sur la réaction

des cellules immunitaires au

complexe métal-protéines ont

été proposés, comme le test

de transformation lymphocy-

taire

(9,10)

, mais présentent un

certain nombre de défauts

(11)

,

dont leur coût élevé. A l’in-

verse les tests in-vivo, comme

les tests épicutanés ou patch-

tests (fig. 1), sont plus acces-

sibles et permettent de tester

simultanément plusieurs hap-

tènes

(12)

. Cependant la validité

des tests cutanés pour tester

une hypersensibilité tissulaire

a été contestée car les types

de réactions immunitaires sont

différentes

(13)

, mais certains

auteurs

(14)

ont avancé que les

produits de corrosion circulent

et atteignent les annexes cuta-

nées positivant les test épicuta-

nés . De plus il semble que la

sensibilisation apparaisse chez

des sujets prédisposés généti-

quement

(15)

. Mais la question

principale autour de la relation

cause-effet n’est pas encore

résolue. En effet, aucune étude

clinique n’a clairement établi

un lien entre une éventuelle

hypersensibilité aux métaux et

le devenir d’une PTG.

Les seules études publiées

ont simplement mis en évi-

dence la plus forte proportion

d’hypersensibilité aux métaux

dans les groupes de prothèses

descellées

(13)

, et des réac-

tions histologiques typiques

sous la forme d’infiltrats lym-

phocytaires péri-vasculaires

(fig. 2) décrits par Willaert

(16)

lors des reprises de couples

MOM au niveau de la hanche.

Ainsi dans une étude prospec-

tive

(17)

, Granchi a retrouvé

15 % d’hypersensibilité cuta-

née à au moins un haptène

métallique dans une popula-

tion témoin (20 cas), alors que

ce taux était de 44 % dans une

série de PTG stables (27 cas) et

atteignait 57% dans une série

de PTG descellées (47 cas).

Dans cette étude les 2 haptènes

le plus fréquemment en cause

étaient le Nickel et le Manga-

nèse (23 ,4%), suivi du Chrome

(19 %). De la même façon, si

10 % de la population témoin

présentait un antécédent de

réaction cutanée aux métaux,

ce chiffre n’était que de 3,7 %

dans la série des PTG stables

et s’élevait à 15% dans la série

des PTG descellées. La spéci-

ficité et la sensibilité des tests

épicutanés s’améliore si on ne

tient compte que des réactions

cotées à 2+ ou 3+

(17)

, surtout

si ils sont corrélés à un antécé-

dent de réaction cutanée aller-

gique retrouvé par un interro-

gatoire spécifique.

Les réactions allergiques ren-

contrées après PTG peuvent

prendre la forme d’un eczé-

ma de contact

(18)

, d’un épan-

chement chronique

(19)

, ou de

douleurs inexpliquées

(20)

. La

relation avec un descellement

est moins claire, mais l’activa-

tion des T-lymphocytes peut

stimuler des facteurs ostéoclas-

tiques perturbant l’équilibre

osseux

(21)

. Le nickel, le chrome

et le cobalt peuvent augmenter

les molécules d’adhésion inter-

cellulaires telles que l’ICAM-1,

provoquer la production de

TNF-α, d’IL-1 au niveau des

monocytes mais également

avoir pour conséquence une

nécrose/apoptose. Le fait

que les macrophages stimulés

par les ions métalliques favo-

risent une ostéolyse et donc

un descellement de l’implant

a été étayé par la mise en évi-

dence de la libération accrue

des métalloprotéases matri-

cielles (MMP), d’IL-6 et de

TNF-α, mais aussi par l’expres-

sion RANK-Ligand comme

inducteur d’ostéoclastes. Mais

on ne sait pas encore quelles

conditions sont à l’origine

de la prépondérance d’infil-

trats lymphocytaires autour de

l’implant

(16)

.

Au total le diagnostic d’allergie

doit reposer sur une approche

combinée associant l’anamnèse

allergologique en s’appuyant

sur la fiche de la SFHG (anté-

cédents d’allergie de contact

cutanée à des bijoux fantai-

sies, des bracelets montres,

des boucles de ceinture, des

boutons de jean, des gants en

cuir…), les test épicutanés, et

une évaluation histologique

de la réaction en périphérie de

l’implant.