pour chaque patient, nous se-
rions en mesure de battre l'or-
dinateur. Nous avons fait près
de 500 cas et des collègues
évaluateurs qui ne savaient pas
dans quel groupe étaient les
patients, mesuraient les axes sur
les radios. A la fin, ils nous ont
dit que nous avions 21 % de
valeurs non satisfaisantes avec
notre méthode conventionnelle
contre 9 % avec la navigation.
Et moi je me suis dit "Bon
Dieu, je ne suis pas aussi bon
chirurgien que je le pensais ".
: Il y avait donc une
nette différence !
A.M .:
Bien sûr, et cela a été
publié dans le Journal of Ar-
throplasty en 2007. Après cela,
nous avons fait des milliers d’in-
terventions naviguées et nous
avons commencé à analyser
les valeurs non satisfaisantes.
Quelles en sont les causes avec
la chirurgie naviguée? Les pa-
tients avec une déformation
extra-articulaire sévère, en par-
ticulier au fémur constituaient
un des facteurs. Par exemple,
les patients présentant plus de
20° de déformation en varus.
Les patients avec un angle de
divergence énorme, c'est à dire
l'angle entre le plan de coupe
du fémur et celui du tibia.
Plus cet angle de divergence
est grand, plus il est probable
que vous ne puissiez pas équi-
librer le genou. Donc, ce n'est
pas vraiment une question de
mauvais alignement, mais aussi
une question de ne pas pouvoir
équilibrer le genou. Et c'est ce
qui conduit à certaines des tech-
niques que j'ai décrites, telles
que l'ostéotomie de translation
du condyle interne. Beaucoup
de chirurgiens français utilisent
l'ostéotomie de translation au
condyle externe en cas de genu
valgum mais pas pour un genu
varum. Nous sommes allés au
laboratoire d’anatomie et nous
avons fait des études cadavé-
riques avec la navigation pour
comprendre comment faire
correctement cette ostéotomie
condylienne médiale. En fin
de compte nous avons com-
mencé à le faire chez certains
de nos patients à grande défor-
mation et nous avons translaté
le condyle interne distalement
pour équilibrer correctement
le genou. Nous avons publié
notre technique dans le Clinical
Orthopaedics.
: La navigation est
certainement utile dans les
déformations sévères, mais
dans les genoux arthrosiques
habituel cela fait perdre du
temps…
A.M. :
C'est une vraie ques-
tion. Je reconnais que vous
n'en avez pas besoin pour les
cas de routine mais d'un autre
côté, si vous ne le faites pas
avec vos cas les plus simples,
sans expérience préalable vous
ne pourrez pas soudainement
l'utiliser pour un cas complexe.
Cela n'a pas de sens. Par ailleurs
vous pouvez utiliser la naviga-
tion partiellement et dans la
mesure de vos besoins. Si vous
sentez que dans un cas particu-
lier, vous devez affiner la coupe
fémorale, faites votre coupe
fémorale avec la navigation,
puis faites le reste de la chirurgie
comme d'habitude. Vous n’êtes
pas obligé de naviguer du début
à la fin. En fait, passé le temps
de l’apprentissage, faire de la
chirurgie assistée par ordina-
teur prend moins de temps que
la chirurgie conventionnelle. Si
parfois je dois faire une PTG
par chirurgie conventionnelle
parce que l'ordinateur n'est
pas disponible, cela me prend
10 minutes de plus qu'avec la
navigation.
: Y a-t-il eu des perfec-
tionnement récents des sta-
tions de navigation ?
A.M. :
Oui, je pense que le
logiciel s'est amélioré car c'est
beaucoup plus rapide mainte-
nant. Placer les broches et en-
registrer les points de repère ne
prend pas plus de 3 minutes.
Donc, c'est très rapide et ça
nous donne beaucoup d'infor-
mations sur les parties molles.
Nous sommes en mesure de
mieux gérer nos ligaments et de
voir dans quelle partie du sec-
teur de mobilité ils sont tendus.
Je pense que la navigation est
très utile. Il existe également
des données du registre austra-
lien montrant que l'utilisation
de la navigation, en particulier
chez les patients de moins de
65 ans, a permis de réduire le
risque de reprise.
: Qu e l l e e s t vo t r e
opinion sur les guides de
coupe personnalisés ?
A.M. :
Je pensais que c’était une
bonne idée, mais j'ai regardé la
littérature très attentivement et
j'ai parlé à des utilisateurs. Il y
a trois inconvénients majeurs.
Premièrement il faut un délai de
4 à 6 semaines pour obtenir ces
guides. Chez nous, le patient
consulte quand il est prêt pour
la chirurgie, alors quand vous
lui dite: «Je ne peux pas vous
programmer avant 6 semaines»,
il s’en va ailleurs. Deuxième-
ment, je pense que cela coûte
200 $, ce qui est une grosse
somme d'argent pour nos
patients. C'est presque qu’au-
tant que la prothèse. Que coût
du dispositif jetable soit voisin
de celui de la prothèse, c’est dif-
ficile à justifier. Troisièmement,
les résultats initialement obte-
nus étaient bons, mais lorsque
les chirurgiens non-concepteur
ou évaluateurs ont commencé
à les utiliser, la précision n'était
pas si bonne, surtout au tibia.
Si vous devez utiliser un outil
supplémentaire, c’est quand
même pour améliorer la préci-
sion ! J'étais très à l'aise avec la
navigation, donc je n'ai pas vu
l’intérêt de recourir aux guides
de coupe personnalisés.
: Les 18
es
Journées
Lyonnaises du Genou sont
dédiées aux reprises de
PTG ...
A.M. :
Oui. C'est super d'avoir
un congrès entièrement dédié
aux reprises. C'est une initiative
très courageuse et je pense que
c'est aussi très opportun parce
que les reprises sont de plus en
plus courantes et importantes.
En outre, il y a beaucoup de
confusion dans ce domaine. Je
rencontre souvent des chirur-
giens lors des congrès qui me
montrent une radiographie
d'un patient et disent « Ce pa-
tient a besoin d'une révision
pour instabilité ». Ensuite, ils
se mettent à envisager des tiges
dans le fémur et le tibia, ce
qui n'est pas pertinent. Ils ne
semblent pas avoir compris que
la fixation et la restauration de
la stabilité sont des problèmes
distincts. J'essaie de leur dire
qu'ils n'ont pas nécessairement
besoin d'un haut niveau de
contrainte des implants lors-
qu'ils font une chirurgie de re-
prise. Même dans une chirurgie
primaire, certains mettent en
routine des implants contraints
pour un genu varum. Je n'ai
jamais utilisé un implant
contraint pour un genu varum
sauf à deux reprises sur plus
de 12 000 PTG. C’était lorsque
le plan externe était tellement
distendu que nous avons dû
mettre un insert très épais.
Ceux-ci ne sont disponibles
que dans la version contrainte
où vous avez un insert de
20 mm d'épaisseur, et c'est
pourquoi j'ai utilisé un implant
plus contraint. Mais dans une
situation de reprise, vous n'avez
pas nécessairement besoin de
mettre un implant contraint à
tous les coups. Donc, je pense
qu'il est très bon d'avoir un
congrès où vous pouvez abor-
der de telles questions et dé-
battre du type de prothèse dont
vous avez vraiment besoin lors
d’une reprise
: Comment gérer les
pertes osseuses?
A.M. :
C’est un problème. Faut-
il utiliser des cales et des tiges?
Faut-il utiliser un manchon ou
des cônes? Faut-il remplir avec
du ciment? Ou juste poser une
prothèse massive, tout résé-
quer et utiliser une charnière?
Je pense que c'est important de
planifier la gestion des défects
osseux. L’autre partie du pro-
blème est de restaurer la stabi-
lité et la cinématique du genou.
Comment restaurez-vous votre
interligne articulaire? Les gens
n’y pensent pas assez lors des
reprises. Dans les premières
intentions, ce n'est pas un pro-
blème. Mais dans les reprises
vous verrez que souvent une
trop grande partie du fémur dis-
tal a été réséquée, donc à moins
RENCONTRE
MAITRISE ORTHOPEDIQUE
//
9